Sonnets contraints - Saisons Retour à la page précédente Retour au sommaire de KaFkaïens Magazine
 

 
 
-- Bucolique --
 

A l'aube je partais dans la forêt humide
Mon chien primesautant marquait quelques arrêts
Pour dissiper l'ivresse, blessure de cabaret
Je battais les fourrés, le corps et l'esprit vides.

Dans le sol détrempé, je poucetais un guide
De mon bâton de marche aux ferrures carrées
Pour ne pas m'égarer, tandis que du paquet
Je tirais le tabac prisé d'un nez languide.

Les brumes de rosée me redonnait espoir
Mon esprit s'affûtait comme un fil de tranchoir
Qui s'aiguise en crissant au contact de la pierre.

Le vent entre les arbres sifflait un air mineur
Je suivais du regard quelque oiseau sans valeur
Entre les frondaisons inondées de lumière.

 
PmM
 
-- Tourisme --
 

Dans les recoins gluants de ma mâchoire humide
Il est de petits bouts mâchonnés sans arrêt
De victimes traquées tout près des cabarets
Dans le sombre Pigalle d'un Paris qui se vide.

A ces touristes mous, je me présente en guide
Et leur fait visiter le Louvre, la Cour Carrée
Mais j'ai déjà en bouche le goût des pieds paquets
Les saveurs capiteuses de leurs abats languides.

Il faut que le bétail garde toujours espoir
Et ne voit que trop tard la lueur du tranchoir
Sinon toute la chair est dure comme pierre.

Cuisiner le touriste n'est pas un art mineur
Il faut rendre à chacun sa plus juste valeur
Et sur l'âme et le corps faire toute la lumière.

 
EM
 
-- La Cigale --
 

Bientôt tu sortiras de ta cachette humide
Et tu pourras enfin striduler sans arrêt
Donnant à la campagne cet air de cabaret
Dont la scène bruyante est apparement vide.

Laisse s'épanouir cet instinct qui te guide
Et déploie au soleil tes élytres carrées
Pétrit, roule et savoure cette sève en paquet
Dont tu rêvais, ô larve, dans ton sommeil languide.

Chante ton petit air de violon plein d'espoir
En priant que t'épargne le coup de bec tranchoir
Ou du sale gamin la mort d'un jet de pierre.

Dévide ta complainte sur tous les tons mineurs
Appelle de ton cri l'élue dont la valeur
Brûlera en deux jours ton âme de lumière.

 
PmM

 

 
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