Hong Kong Stories Retour à la page précédente Retour au sommaire de KaFkaïens Magazine
 
 
30 mars 2003
 

Il se passe depuis quelques jours plusieurs événements curieux qu'il serait juste de consigner ici. De l'avis général, ces événements sortent un peu de l'ordinaire, du moins l'ordinaire d'une ville verticale ordinaire telle que Hong Kong. Une ville plutôt laide d'ailleurs, comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire. Certes, il faut un peu de temps pour comprendre ce qui la rend particulière parmi toutes les cités commerciales du monde. Une manière assez simple de le faire est de vivre ici quelques années.
Travailler, aimer, mourir : dans cette ville, est-ce l'effet du climat, tout se fait avec le même air frénétique et absent. Il est vrai que ses habitants travaillent beaucoup, et toujours pour s'enrichir. Bien sûr, ils ont aussi des joies simples : les programmes de télévision, les dîners en famille et les courses de chevaux. Mais ils réservent ces plaisirs pour la fin de la journée et le week-end, essayant le reste du temps de gagner beaucoup d'argent. Le soir, les hommes se réunissent dans de petites gargotes sur les trottoirs pour discuter et regarder les gens passer. Les désirs des plus jeunes sont violents et brefs, tandis que ceux des plus âgés ne dépassent pas les parties de cartes tard dans la nuit.

Sans doute, cela n'est pas particulier à cette ville. En somme, les hommes d'aujourd'hui sont ainsi : rien de plus naturel maintenant que de voir les gens travailler du matin au soir et de perdre ensuite devant la télévision, au restaurant ou aux jeux de hasard, le temps qui leur reste à vivre. Mais il est des villes et des pays où les gens ont, de temps en temps, le soupçon d'autre chose. En général, cela ne change pas leur vie. Mais il y a eu le soupçon, et c'est toujours ça de gagné. Hong Kong au contraire est une ville sans soupçons, c'est-à-dire une ville tout à fait moderne.
Ce qu'il y a de plus original dans cette ville, c'est la difficulté que l'on trouve à y mourir. Difficulté, ou plutôt inconfort. Il n'est jamais agréable d'être malade, mais il y a des villes et des pays qui vous soutiennent dans la maladie. Un malade a besoin de douceur, il aime à s'appuyer sur quelque chose, c'est bien normal. Mais à Hong Kong, l'excès du climat, l'importance des affaires qu'on y traite, l'insignifiance du décor, la rapidité des crépuscules, la qualité des plaisirs, tout cela demande une bonne santé. Un malade s'y trouve bien seul. Qu'on pense à celui qui va mourir derrière des murs suintant sous la chaleur pendant qu'à la même minute, toute une population sur son téléphone mobile ou sur Internet s'informe des cours de la Bourse ou de la guerre en Irak. On comprendra alors ce qu'il peut y avoir d'inconfortable dans la mort, même moderne, lorsqu'elle survient ainsi dans un lieu humide et surpeuplé.
Cependant, il ne faut rien exagérer : on vit très bien à Hong Kong dès qu'on y a contracté des habitudes. Sans doute, la vie pourrait être plus passionnante. Mais du moins, on ne connaît pas ici le désordre. La population sympathique, active a toujours provoqué chez le visiteur de passage une certaine estime. La ville est d'ailleurs greffée sur un paysage sans égal, entourée de collines lumineuses, face à une baie au dessin parfait. On admettra donc que rien ne pouvait donc laisser présager aux habitants les incidents qui se produisirent en ce début de printemps. Mais il est temps d'en venir aux événements eux-mêmes.

 
 
PVK
ohoui@kafkaiens.org vos réactions ahnon@kafkaiens.org
  KaFkaïens Magazine - Tous droits réservés Retour à la page précédente Retour au sommaire de KaFkaïens Magazine